Maryse et Roger sont donc à l’origine de CHABADA. Ils ont choisi de transformer complètement leur maison pour se consacrer à ce projet de vie.

Avant d’être de fougueux retraités, ils ont tous deux travaillé en collège, elle, professeure de biologie, lui, instituteur spécialisé. Ils se sont toujours très investis dans la vie associative, dans les associations de quartier.

Roger a d’ailleurs rejoint Habicoop à ses débuts, l’une des premières sociétés d’habitat coopératif françaises fondée en 2005, dans laquelle travaillait Valérie Morel avant de créer Cap Habitat Coopératif.

Ce n’est pas vraiment un hasard si le couple se lance dans un tel projet. Ils n’ont jamais vécu dans une maison individuelle, passant de copropriétés en copropriétés, en France mais aussi en Egypte et en Algérie.

Ils sont déjà très impliqués dans leur quartier qu’ils connaissent bien et le PLU (plan local d’urbanisme) est le livre de chevet de Roger.

Pour eux, l’habitat coopératif est un mouvement qui navigue à contre-courant, qui revendique un logement durablement abordable, une qualité de vie... alors que la tendance est plutôt à construire un maximum de logements sur un minimum de place.

Les futurs résidents sont directement impliqués dans la coopérative, bien en amont de la construction, ils doivent faire tout le travail de maîtrise d’ouvrage qui est fait habituellement par le promoteur. (Heureusement, Wonder Valérie et Super Simon vont tenter de faciliter ce travail.)

C’est un fonctionnement inhabituel qui nécessite de l’engagement de la part des futurs résidents . C’est bien ça qui plait au couple, miser sur l’intelligence collective plutôt que laisser les autres choisir à leur place.

Une fois la décision prise, le couple a commencé à former le groupe qui habitera cette maison.

Le P.L.U a limité la capacité à 6 logements, ce sera donc une petite coopérative. Les appartements n’étant pas assez grands pour des familles, ils ont décidé d’en faire une coopérative pour séniors.

Maryse et Roger ont pu puiser dans leurs relations dans la vie associative pour faire venir les premiers membres de CHABADA (Anne-Marie et Denis, Gilles et Michèle, Vincent). Tous ensemble, ils doivent encore trouver les derniers Chabadiens.ennes !

Michèle et Gilles habitent une maison de Vaulx-en-Velin. Ils ont toujours vécu dans l'agglomération lyonnaise. Michèle est très attachée à son quartier dans lequel elle a construit toute sa vie.

Avant, elle était infirmière psy et Gilles psychiatre, ils travaillaient en équipe, c'était de la psychiatrie liée au groupe. Le groupe n'a pas quitté Michèle qui milite toujours dans beaucoup d'associations et connait très bien les coopératives d'habitants.

Il y a quelques années, le couple a failli rejoindre une coopérative mais Gilles n'était pas encore prêt à sauter le pas.

Michèle est secrétaire de l'association Habicoop-Aura, c'est là-bas qu'elle a connu Roger quand il était le président. Ils se voyaient beaucoup à l'époque, au point de rendre Gilles un peu jaloux. Michèle est devenue très amie avec Roger et Maryse.

Au sein de cette structure locale, Michèle et Roger ont contribué au montage de la coopérative d'habitants Chamarel (considérée comme la grande sœur de Chabada).

Chabada n'est pas leur première expérience d'habitat partagé.

Gilles, lorsqu'il était avec sa première femme, a vécu dans un appartement coupé en 2. Ils partageaient le lieu avec un autre couple, mangeaient ensemble, recevaient des amis...

De son côté, Michèle a vécu dans des communautés dans les années 1970-1980.

En 2010, le couple était tout près de rejoindre une coopérative d'habitants. Michèle a monté le projet Chamarel avec des amis à elle. Elle y était très impliquée et avait l'envie d'y emménager avec Gilles.

Quand l'occasion s'est présentée pour Chabada, Michèle était toujours très enthousiaste et pour Gilles, la situation avait un peu changé...

Gilles est maintenant à la retraite, il va devoir recomposer son quotidien. En rejoignant Chabada, il souhaite éviter la solitude et surtout trouver des adversaires pour jouer aux jeux de société, passion que ne partage pas Michèle.

A Chabada, ils ne connaissent que les Dumont. Ils ont pu faire la connaissance des Brucker et de Vincent.

La prochaine étape délicate sera l'introduction des nouveaux habitants, le groupe a des contacts qui sont intéressés et qui pourront, si les deux partis sont d'accord, les rejoindre.

Son repaire, c’est la scop du NTH8 (Nouveau Théâtre du 8ème) qu’il co-dirige. Il a aussi créé en 2003 un syndicat national qui représente les compagnies indépendantes de spéctacle vivant.

C’est une vie professionnelle riche de rencontres, le collectif est très présent dans sa vie.

Maintenant en semi-retraite car il n’a pas totalement arrêté, il a accepté la proposition de Roger de rejoindre ce projet d’habitat coopératif.

C’est lors d’un atelier théâtre organisé par Roger, et conduit par Vincent, que les deux futurs Chabadiens se sont rencontrés.

Vincent ne connaissait rien à ce type de projet et n’avait pas vraiment réfléchi à l’avenir, ça l’a donc interrogé. Lui qui est propriétaire d’un appartement au 3ème étage sans ascenseur, il savait qu’un jour ou l’autre, il faudrait déménager.

Il voit en Chabada une perspective par rapport au vieillissement à venir, avoir un projet collectif à ce moment là de la vie l’intéresse beaucoup.

La coopérative semble en tout cas l’inspirer dans son travail. Lors des Rencontres Nationales de l'habitat participatif de 2021, il a mis en scène «Le procès de la propriété privée» avec sa troupe de théâtre.

Quitter son quartier, déménager tous les livres et les films de son appartement aussi appelé «institut lumière bis», ça le fait encore réflechir.

Vincent se dit encore dans une phase d’apprentissage. Il a toujours la liberté de renoncer à ce projet si celui-ci ne correspondait finalement pas à ses attentes.

Le comédien ne s’imaginait pas que le projet serait d’une telle complexité, en revanche il apprécie l’ouverture et les rencontres que cela crée. (architecte, techniciens, auteur de bd...).

Il aimerait par la suite que Chabada soit ouvert sur la vie du quartier, qu’il y ait des lectures et des projections dans les espaces communs par exemple. Idée que semble partager le reste du groupe et qu’il faudra prendre en compte dans la création de Chabada.

Anne-Marie et Denis vivent dans une maison à Rillieux-la-Pape. Cette maison est en fait un logement de fonction car Anne-Marie est infirmière à l’éducation nationale. Denis, lui, est artisan-paysagiste à son compte.

Ils avaient vendu leur ancien appartement pour rejoindre une autre coopérative mais ça ne s’est finalement pas déroulé comme prévu...

En 2009, le couple a décidé de rejoindre Coop en Germ’, une coopérative en création à Saint-Germain au Mont d’Or soutenue par Habicoop.

Ils y ont retrouvé Roger, avec qui Anne-Marie avait milité plus jeune, et fait la connaissance de Michèle, secrétaire d’Habicoop.

Ils avaient construit un groupe qui se réunissait tous les mois. C’était la première fois que Denis et Anne-Marie participaient à un projet de vie en collectif.

C’était un projet intergénérationnel d’une quinzaine de foyers.

Malheureusement, à cause d’un changement de maire, le terrain sur lequel la coopérative devait s’installer ne leur a finalement pas été attribué.

Coop en Germ’ a cherché tant bien que mal pendant 6 ans à trouver du foncier, le groupe était formé, il ne restait plus que le terrain...

Ça a été un choc terrible, Denis et Anne-Marie avaient alors renoncé à l’idée depuis.

Parmi les motivations du couple de faire parti d’une coopérative, il y a la volonté d’être en cohérence avec ses valeurs, notamment écologiques.

Selon Anne-Marie, on ne peut pas tous avoir sa maison avec son petit jardin autour. Il n’y a pas de place pour tout le monde. Il faut densifier et pas continuer l’étalement urbain.

L’idée de propriété privée, de spéculer sur l’immobilier les insupporte. Ils ont trouvé en l’habitat coopératif une solution alternative en adéquation avec leurs valeurs.

A la base, leur souhait était de s’installer à la campagne. Ils ont longtemps tergiversé avant d’accepter la proposition des Dumont. Il ont dû peser les "pour" et les "contre", faire certaines concessions, c’était un nouveau pari.

Aujourd’hui, cet échec les a mis dans une certaine dynamique, ils ont pu rencontrer des gens chouettes qui partagent les mêmes valeurs. Ils abordent ce nouveau projet avec de l’expérience, ils ont connaissance des problématiques liées à la création d’une coopérative.

Avec 15 foyers, une organisation était nécessaire pour que les réunions de Coop en Germ’ avancent, que tout le monde soit écouté. Les coopérateurs ne devaient pas être absents plus de 3 fois lors des CA, le groupe avait mis en place un secrétaire, une personne qui donnait la parole et un bâton de parole, un vrai !

A Chabada, le groupe est petit, une telle organisation n’est pas nécessaire mais d’autres enjeux se posent. La composition du groupe aura plus d’importance, il faut que tout le monde s’entende car ils ne pourront pas s’ignorer.